La Méditation Comme une Messe
Par Aftoprokroústês
- 3 minutes de lecture - 541 motsLorsqu’on lit les échanges et conseils liés à la méditation (sous toutes ses formes), il ressort deux choses. Premièrement, beaucoup de gens sont attirés, mais peinent à “se motiver”. Deuxièmement, beaucoup de gens considèrent (ou “vendent”) la méditation comme un “entraînement mental” ( ou pire, “cérébral”). Je propose que cette fantaisie, cette manière de considérer la méditation, est intimement liée à ce manque de motivation.
Plutôt que cette vision utilitariste de la méditation, je propose de voir la méditation comme une cérémonie, une messe, un acte de dévotion et de respect face au mystère du monde.
De la même manière que le Kyrie1, dans une messe, est un acte de dévotion en soi, et pas seulement un “échauffement”, peut-on voir chaque action dans une séance de méditation comme un acte de dévotion envers le divin? Chaque événement, chaque phénomène comme une grâce, un cadeau? Ainsi, se concentrer sur une sensation n’est pas un mouvement d’entraînement, comme l’athlète qui soulève un poids, mais un mouvement vers le mystère, un mouvement de l’Eros: je veux me rapprocher de ce mystère, le pénétrer, m’y baigner. Et se perdre dans ses pensées n’est pas un échec, mais un signe du mouvement du monde, du dynamisme de la conscience, une part du mystère. Car au fond, n’est il pas extrêmement intéressant que “je” pense, alors que “je” m’établis dans la non-pensée? N’y a-t-il pas un paradoxe à explorer? Ce phénomène n’est-il pas un cadeau qui m’aide à déconstruire l’idée mal finie de ce “moi” que j’ai bricolé depuis des décennies? N’est-ce pas un phénomène fascinant que “je” puisse à la fois faire preuve de libre arbitre en décidant de porter mon attention sur les phénomènes mentaux, et simultanément être incapable de contrôler où mon attention se dirige?
Dans ce contexte, n’hésitez pas à inclure du rituel, du religieux, que la vision “séculaire” de la méditation tente de mettre à la porte. Prosternez-vous, priez, brûlez des kilos d’encens, criez au ciel, roulez-vous dans la boue, peu importe! L’important est de faire de ce moment une cérémonie, un acte de dévotion et d’ouverture au mystère. Et alors la méditation révèle enfin sa beauté. Ce n’est plus une corvée, mais un acte nécessaire, désirable, attirant, et ce quels que soient les “résultats”2.
Crédit Photo JOHN TOWNER
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Le Kyrie est la première partie d’une messe, ou l’on demande au seigneur et à Jésus de prendre pitié de nous, pauvres pêcheurs. Cette partie de la messe est censée mettre le fidèle dans une attitude d’humilité qui permet au reste de la cérémonie de faire son effet. Il s’agit cependant plus qu’une simple formalité: j’en veux par exemple pour preuve la beauté et la profondeur des trois parties du Kyrie de la messe en Si Mineur de Bach (BWV 232), qui durent ensemble un total de presque 20 minutes!. ↩︎
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il y a d’ailleurs beaucoup à dire sur cette attente de résultats: bien qu’il soit parfaitement normal d’arriver à la méditation avec un but en tête (plus de calme, une plus grande facilité à se concentrer, établir un dialogue direct avec le divin, et j’en passe), il semble que de ne considérer la méditation que comme un moyen d’arriver à ses fins non seulement retire beaucoup de beauté, mais diminue aussi son effectivité. ↩︎
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